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Prédation lupine

Les chiffres
Les chiffres

Dans le département de la Drôme, les attaques sont récurrentes et meutrières. Chaque année, entre 250 et 300 brebis sont officiellement tuées par le loup (c'est à dire reconnue comme tel par l'ONCFS). C'est l'équivalent d'un troupeau moyen drômois, faisant vivre une personne. Ces statistiques ne comptent pas les animaux bléssées, les disparues, ni les brebis "traumatisées" qui ne mettront plus jamais bas. Et surtout, ces chiffres ne montrent pas la détresse et le stress subi par les éleveurs. 

En 2017 dans la Drôme, on atteint de nouveaux records : 568 animaux ont été indemnisées. Cela concernait 169 attaques. A cela s'ajoute 182 disparues (voir le tableau ci dessous). Le massacre continue....

En plus de voir leur outil de travail détruit régulièrement, les éleveurs se voient accusés de tous les maux : ils ne protègent pas leurs troupeaux, ce sont des mangeurs de subventions et des feignants. Ils détruisent les écosystèmes et la montagne. Dans une région comme la nôtre où l'agriculture fait vivre les petites communes et l'élevage extensif entretient les belles prairies d'alpage, ils est désolant de voir que les gens se trompent de coté. Non, les éleveurs ne sont pas les destructeurs de la Nature.

Plus grave encore : aujourd'hui de petits troupeaux sont impactés. Comme cet éleveur bovin à St Andéol en Quint. Il a monté son troupeau tout seul, sans subventions, il est en plein air intégral, valorisant un maximum les surfaces fourragères peu productives, réhabilitant des espaces désertés et participant à la Défense des Forêts Contre les Incendies. Il est  aussi double actif. Il a du se battre pour obtenir le droit de défendre son troupeau, via un arrêté d'autorisation de tir de défense. Etant éleveur de bovins, il n'a pas le droit aux subventions des mesures de protection. Et pourtant, il se voit contraint d'arrêter son activité car ses vaches se font tuer les unes après les autres sous ses yeux. Contraint de renoncer à sa passion, à ce qu'il a construit durant 20 ans.

Et que dire de cet éleveur de brebis d'Aouste sur Sye, qui s'est vu refuser les indemnisations parce qu'il n'est pas agriculteur à temps plein? Il n'a que quelques brebis (15 tout au plus), s'en est fait mangé la moitié et n'a pas eu d'indemnités car il n'a pas de numéro siret agricole. Administration quand tu nous tiens! Ces éleveurs, la FDO les défendra au maximum de ses capacités.

Bilan des attaques de loups sur troupeaux domestiques en Drôme en 2017

En région Auvergne-Rhône-Alpes, le loup a fait en 2017, 862 attaques et 3 444 victimes animales (majoritairement brebis, mais aussi bovins et équins). L'augmentation est exponentielle ces trois dernières années.
La Drôme, la Savoie et l'Isère étant les départements les plus touchés, l'Ardèche et la Haute-Savoie sont aussi, dans une moindre mesure, victimes du fléau. Dans l'Ain le grand canidé fait peu de dégâts, mais le lynx est redoutable. En 2015, 158 brebis ont péri sous ses crocs. La problématique du lynx est autre que le loup : l'animal se spécialise sur une exploitation et peut attaquer le même troupeau toutes les semaines, pouvant faire jusqu'à une cinquantaine de brebis mortes en quelques mois.

 

 

 

A l'échelle nationale, en 2017 : plus de 11 000 brebis ont été reconnues victimes du loup (11 741 pour 3 192 attaques). Depuis l'apparition du loup, 174 éleveurs voient leur troupeau attaqué tous les ans (source : ministère de l'écologie). Le coût du loup en France en 2017 s'élève à 26 millions d'euros (indemnisation des éleveurs + mesures de protection). Ce chiffre ne compte pas la surcharge de travail découlant des attaques, réalisée par les gardes de l'ONCFS pour les constats, les louvetiers pour effectuer les opérations de tirs et les services administratifs de l'Etat qui gèrent les dossiers d'indemnisation et de mesures de protection, sans compter les éleveurs et les bergers,

Témoignages

Margot, éleveuse à Glandage, en réponse à l'ASPAS, qui a filmé en novembre 2015 ses brebis dans un parc

Début novembre, des membres de l'ASPAS ont pénétré dans le parc électrifié où pâturaient nos brebis dans le but de faire « la preuve » de l'inefficacité des mesures mises en œuvre par les éleveurs pour protéger leur troupeau des attaques de loups. Ils ont filmé cette intrusion et diffusé la vidéo sur internet.

Dans cette vidéo, nous apprenons que « des éleveurs qui ne font pas leur boulot, ça n'a rien d'exceptionnel. Ici, du côté de Glandage, ils méritent bien leur nom ». La violence de ces propos diffamatoires pourrait facilement nous entraîner sur le terrain des querelles stériles entre « proloups » et « anti-loups », entre les « écolos » et les éleveurs, soit disant anti-écolos.

Il nous semble néanmoins important de réagir à cette provocation qui repose sur une approche

simpliste et puérile de la question sans jamais apporter d'éléments de fond.

Nous sommes paysans sur une petite ferme de montagne, en polyculture-élevage. Nous produisons

des légumes en traction animale, à partir de semences paysannes et biologiques. Nous avons des

ruches, des poules, des cochons et un troupeau de brebis mérinos qui parcourt les landes

avoisinantes, produit de la viande, un peu de lait pour la famille, et de la laine que nous

transformons localement. Toutes nos productions sont vendues en circuit court. Nous avons

construit notre ferme sur l'association de l'agriculture et de l'élevage dans un souci de cohérence

globale et d'autonomie. Le choix de l'agriculture biologique et de la traction animale nous permet

de mettre en pratique nos préoccupations environnementales.

Nous sortons nos brebis la journée dans des parcs électrifiés et les rentrons la nuit en bergerie. Le loup attaquant encore majoritairement la nuit, nous avons jusqu'à maintenant été épargnés. Mais nous vivons cette situation comme un sursis ; que le loup vienne à attaquer le jour et c'en est fini de notre élevage. Ce que montre cette vidéo c'est avant tout à quel point ses auteurs ignorent tout de nos pratiques. Si l'on suit le raisonnement de l'ASPAS, le seul moyen de faire de l'élevage en présence du loup consiste à enfermer les bêtes : hors sol et élevage industriel. Mais nous arriverions là aux antipodes de l'élevage pastoral.

Compte tenu de l'absence de moyens de protection réellement efficaces contre le loup, l'élevage pastoral n'a aucune chance face à ce prédateur. On aura alors perdu la biodiversité et la richesse culturelle liées au pastoralisme, au bénéfice d'une seule espèce, aussi emblématique soit-elle.

Le discours de l'ASPAS est basé sur une vision de la nature anthropocentrée, symptomatique des pays riches, urbanisés et coupés de leurs racines paysannes. Par ce discours simpliste, l'ASPAS prend le rôle du gentil protecteur de la nature et laisse apparaître les éleveurs comme des sanguinaires anti-écolos. Position hypocrite et irresponsable qui fait croire que la société et la nature ne tireront que des bienfaits d'une protection totale du loup, quitte à sacrifier l'élevage pastoral, son patrimoine humain et culturel et la biodiversité qui lui est liée. A ce train là, le loup ne risque-t-il pas d'incarner plutôt une forme de nature totalitaire ?

 Margot Jobbé Duval et Christophe Morantin, éleveurs à Glandage

Jean-Claude Bouvet, éleveur de bovins à St Julien en Quint - extraits

Appel à soutien pour Madame Monnier

Bonjour Madame,

Je me permets de vous contacter car j'ai lu dans la presse que vous avez invité le ministre de l'Agriculture dans la Drôme à venir débattre au sujet du loup . (...)

Aussi j'aimerais vous soumettre quelques remarques que vous pourrez si vous le souhaitez aborder lors de ces réunions. Tout d'abord, je tiens à signaler que je ne parle pas au nom de la profession, les organisations professionnelles et les associations le feront très bien . Je parle en mon nom car je ne pense pas être représentatif de la majorité, mais peut-être que des petits éleveurs doubles actifs se reconnaîtront dans mes propos.

(...)

Voilà 20 ans j'ai démarré sur la propriété familiale une petite activité d'élevage en plein air intégral . Après des déboires et surtout beaucoup de travail que j'estime à 15 000 heures pris sur mes congés et weekend, je suis arrivé à monter un petit troupeau d'une vingtaine d'animaux qui commençait juste à me dégager un petit complément  de revenu (...) mon troupeau valorise ces pâturages  pauvres, pulvérisant que dis-je atomisant  ainsi tous les bilans carbone et énergétiques de mes confrères, bio compris ce qui devrait satisfaire notre ministre de l'Environnement

Ayant 50 ans je n'attendais plus qu'une chose c'est d'être à la retraite pour pouvoir me consacrer pleinement à cette activité étant ouvrier de production, je ne dispose pas de revenus extraordinaires je suis à 1300 € par mois pour 31 heures par semaine, (...)

Après deux attaques qui ont laissé trois vaches sur le carreau (...) j'ai, la mort dans l'âme décidé de vendre mon troupeau, (...). L'État doit prendre ses responsabilités et assurer lui-même une protection durable et pérenne des troupeaux avec des agents formés et armés et décidés!! Les attaques ont eu lieu chez moi, il ne s'agit pas là de pâturages départementaux, communaux ,ou de forêt domaniale ou l'état propriétaire pourrait s'il le décidait, protéger les meutes de loup, mais biens d'une propriété privée. (...).

Nos animaux sont BRAVES . Ils produisent quand même malgré tout  car  en réalité, ce sont eux qui font les frais de tout les sacrifices financiers qu'on impose à la filière. Ils ont quand  même le droit d'avoir une fin DIGNE et non pas traqués et dévorés vivant au coin d un bois

Dans notre vie d'éleveurs nous avons tous eu des choix à faire parfois terribles. À la limite, on peut aussi comprendre que l'État fasse des choix notamment de se séparer d'une filière mais pas de la pire façon qui soit en laissant le loup faire le sale travail.

Voilà je pense que ces remarques méritent d'être étudiées. Me tenant à votre disposition pour tout renseignements complémentaires.

Respectueusement.

 Jean-Claude Bouvet

Troupeau de Margot et Christophe à Glandage
Témoignage
Les chiens de protection

Une conséquence logique de la présence du loup, c'est le recours aux chiens de protection, qui permettent aux éleveurs de limiter la violences des attaques du loup. La plupart des éleveurs se passeraient pourtant bien de ces chiens, qui sont pour eux une charge supplémentaire et conduisent à des conflits avec les autres usagers des espaces pastoraux.

Quel comportament adopter si vous rencontrez un chien de protection, type patou ou berger

d'Anatolie ?

Un comportement respectueux avant tout !

Vous pratiquez une activité de plein air sur des espaces que nous partageons avec vous.

Nous sommes heureux de vous accueillir sur ces espaces pastoraux que nous paturons depuis

des générations et que la dent de la brebis et le métier de berger ont façonné pour les rendre

si accueillants.

Loin de nous l’idée de vouloir vous en interdire l’accès mais sachez que nous sommes

propriétaires ou le plus souvent locataires de ces espaces (à des propriétaires privés, des collectivités,….). Nous payons pour faire manger nos animaux dans les prés, les collines, les alpages…

Le patou, le chien de protection le plus utilisé en France
Chiens de protection
Une BD pour savoir comment réagir face aux chiens de protection

Les Patous sont des chiens plutôt placides mais qui viendront à la rencontre de tout élément étranger au troupeau en aboyant et parfois en ayant une attitude agressive.

Contournez le troupeau et surtout n’essayez pas d’approcher une brebis ou de caressez un agneau. S'il n'est pas possible de contourner, il est important de ne pas surprendre le chien. Pour cela, signalez-vous en parlant. En aucun cas, il ne faut traverser le troupeau! Au pire, il faudra faire demi-tour.

Lorsque le chien sera venu à votre rencontre, n’ayez pas un comportement hostile. Crier, courir, brandir ces bâtons de marche ou encore lancer un caillou sont des gestes que le chien peut percevoir comme une agression. Ne regardez pas le chien dans les yeux, gardez votre calme. N'hésitez pas à lui parler gentiment :"bon chien, c'est bien le chien, allez retourne au troupeau!". Ayez une attitude nonchalante. Le fait de bailler, aussi étrange que cela puisse paraitre, montrera au chien votre attitude passive.

Si vous êtes accompagné de votre compagnon canin, tenez-le en laisse. En cas d’altercation il est important de les laisser faire sous peine de morsures. Les bagarres ne durent jamais longtemps l’un des chiens se soumettant rapidement.

Pour les cyclistes, adoptez les mêmes comportements et descendez de votre vélo.

Bonne promenade dans les alpages!

Pour en savoir plus

Une collaboration avec les randonneurs

La FDO de la Drôme a récemment entamé avec la Fédération Française de Randonnée pédestre une collaboration sur notre territoire concernant le multi-usage des espaces pastoraux. La FFR a répondu très favorablement à cette demande et souhaite un travail commun afin de mieux communiquer auprès de tous les usagers : éleveurs, randonneurs, mais aussi les chasseurs. Ce travail a débuté par un article dans la revue trimestrielle nommée Passion Rando. L’article était consacré au comportement à avoir et aux bons réflexes à adopter lors d’une rencontre avec un troupeau de brebis. D’autres pistes ont été envisagées pour poursuivre le travail,  notamment faire de l’information auprès des usagers à travers les différents supports de communication (page facebook, sites internet, topoguides). Un travail de sensibilisation auprès des accompagnateurs de montagne va aussi être entrepris dans certaines régions, lors de leur formation initiale.

3 août 2017

Pour en savoir plus sur la prédation lupine

A lire : "Loup, élevage, s'ouvrir à la compléxité" . Il s'agit d'une étude conjointe du CERPAM (Centre d'Etudes et de Réalisation Pastorales Alpes-Mediterrannée). Mars 2007

A voir : Les morsures invisibles, témoignages d'éleveurs drômois face à la prédation. Voir

             Dans la gueule du loup, film réalisé par Jérôme Ségur, sorti en 2015. Voir la bande annonce

             Retour naturel ou réintriduction des loups ? A vous de juger! Série de 3 films documentaires de Bruno Lecomte. Voir

Sources et liens :

Le site de la DREAL Auvergne Rhône-Alpes : bilans et chiffres sur la prédation lupine

Le site de l'ONCFS : suivi de la population de loups en France

Les éleveurs de brebis face au loup : site de la Fédération Nationale Ovine dédié à la prédation lupine

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